Spectrométrie Raman et capteur optique

Cette activité concerne l’étude des perturbations et des ruptures d’ordre dans des milieux divers (cristaux, polymères, solutions) à travers les signatures Raman liées aux défauts ponctuels ou étendus, dopage, phase ou transformations de phase, domaines, constituants d’un mélange, cristallites, etc. D’autre part, elle s’intéresse également à la métrologie et au contrôle des milieux complexes, avec la recherche d’une relation entre les caractéristiques de raie Raman (position, largeur, intensité) et un paramètre physique : déformation, champ électrique, température, concentration, dimension etc mais aussi corrélation avec d’autres techniques (mesures de rayons X, diélectriques, optiques, …) et couplage avec la mesure Raman (DSC/Raman, WAXS ou SAXS/Raman, Rhéologie/Raman). 

Ces objectifs de recherche sont répartis dans trois grandes thématiques qui correspondent à trois types de milieux : les polymères, les matériaux pour l’optique ou l’optoélectronique ou encore les solutions ioniques. 

L’équipe élabore et développe un capteur à base d’éléments optiques standards pour l’instrumentation et de logiciels d’acquisition et de traitement du signal spécialement adaptés dont le coût est en cohérence avec les enjeux économiques des domaines industriels concernés.

Deux applications ont déjà été principalement mises en œuvre :

  • le contrôle en ligne du suivi de production de films de polymères par fluorescence.
  • le contrôle de l’acide gallique, substance utilisée pour limiter la prolifération d’algues dans les lacs et les étangs, par technique SERS (capteur original).

L’équipe collabore avec la société DIDACONCEPT qui conçoit, fabrique et distribue des produits pédagogiques destinés à l’enseignement supérieur. L’équipe a récemment participé au développement d’un tout nouveau TP sur les principes et les applications de la spectroscopie Raman.
Ces dernières années, l’équipe a effectué des études en partenariat avec de grands groupes industriels tels que Arkema, Total, Edf, L’Oréal ou Sagem.

Polymères

Cette thématique s’étend de l’étude de la synthèse des polymères à la caractérisation des produits obtenus en lien avec le procédé de mise en forme. Nous nous sommes intéressés notamment à l’étude des polymérisations en émulsion et mini-émulsion du styrène afin de suivre in situ et en temps réel la cinétique de réaction, mais aussi à l’étude de la microstructure du matériaux de la fabrication jusqu’à son utilisation finale.

L’originalité de ce travail consiste à extraire du signal Raman des informations sur la structure des hétérogénéités du milieu (nature de la microstructure du matériau, renforts élastomères, aditifs  …).
Nous avons ainsi pu mettre en place des protocoles et procédures pour contrôler par des mesures in-situ l’orientation des chaînes de polymères et la cristallinité de polymères semi-cristallins soumis à des déformations mécaniques ou thermiques. Un brevet sur le couplage vidéotraction-spectroscopie Raman a été déposé.

Matériaux pour l’optique et l’optoélectronique

Deux matériaux ont plus particulièrement retenu notre attention : le niobate de lithium (LiNbO3) pour la détection d’un champ interne et l’effet de dopants, et le titanate de baryum (BaTiO3) pour le rôle du dopage en Ca sur les transitions structurales.

Le niobate de lithium (LN) est un cristal largement utilisé pour des applications diverses en optique et optoélectronique. Ses propriétés sont versatiles dans le sens où elles sont adaptables selon la nature et la concentration de défauts, que ceux-ci sont intrinsèques (liés à la stœchiométrie) ou extrinsèques (dopage). En particulier LN dopé Fe présente d’importantes propriétés photoréfractives. Nos avons montré que le champ de charges d’espace provoque par effet piézoélectrique un léger décalage de certaines raies Raman ainsi qu’une rupture complète des règles d’activité Raman, révélée en transmission, géométrie inhabituelle en spectrométrie Raman. Par ailleurs le comportement thermique des phonons optiques a été établi expérimentalement, et modélisé à partir de contributions anharmoniques du 3ème et 4ème ordre du potentiel. Enfin, la spectrométrie Raman a été utilisée comme spectroscopie de site, combinée à l’analyse en composante principale afin d’estimer les sites d’occupation du dopant Zr dans le réseau de LN et de confirmer l’intérêt de ce dopage en faibles quantités pour la réduction de l’effet photoréfractif.

Le titanate de baryum (BT) est généralement considéré comme l’exemple type de transitions ferroélectriques successives en fonction de la température, transitions induites par une association d’un mode phonon basse fréquence et de relaxation du Ti. Nous nous sommes intéressés aux phonons à haute fréquence et à leur comportement thermique, traité à partir d’un modèle d’anharmonicité. Nous avons aussi étudié l’influence de l’introduction des ions Ca dans le réseau et montré que celle-ci étend le domaine d’existence de la phase quadratique en empêchant une transition supplémentaire.

Enfin les matériaux tels le CIS (Cadmium Indium Soufre), et le  CZTS (Cuivre Zinc Etain Soufre), intéressants pour la conversion photovoltaïque sont également l’objet d’étude par spectrométrie Raman.

Par ailleurs un nouveau cristal de la famille de KDP, le phosphate dihydrogéné de potassium et de lithium KLi(H2PO4)2 (KLDP) est synthétisé au laboratoire et fait l’objet d’ études  (structurales, optiques, électriques…) inter-équipes. Ici nous attribuons les raies aux divers groupements moléculaires, en comparant aux résultats dans les milieux dilués.Les transformations de phase en température sont également étudiées ainsi que dans le cristal proche LiH2PO4 (LDP).

Solutions ioniques et matrices fluides

Cette thématique s’intéresse à l’identification et à la quantification de diverses substances (minérales ou organiques) en solutions par spectrométrie Raman. L’objectif est d’étudier les signatures Raman spécifiques de ces différentes solutions ioniques (nitrate, sulfate, phosphate, acétates, chlorures, etc.) et leurs réponses spectrométriques en fonction de différents paramètres tels que la température (transition de phase) ou la concentration (étalonnage).

Les ions polyatomiques donnent des signatures caractéristiques sous forme de raies Raman utiles pour leur identification dans une solution à travers leurs positions, mais ils perturbent aussi la réponse des bandes attribuées aux liaisons O-H propres au spectre de l’eau. L’étude de ces perturbations est indispensable pour certains anions monoatomiques comme les halogénures (chlorures, fluorures etc.) puisque ceux-ci ne donnent pas de signatures spécifiques mais influencent uniquement le spectre de l’eau, ce qui rend leurs détections et leurs mesures bien plus difficiles dans le cas de solutions mélanges de sels.

L’utilisation des méthodes statistiques permet de décorréler les différentes influences provenant des différents ions dans une solution mélange tout comme l’influence de la température. Ces approches permettent également de suivre les cinétiques de bio-dégradation de composés organiques (formiate, acétate, glycols, éthers fluorés) en lien avec le maintien de la qualité des eaux, ou bien des cinétiques réactionnelles au sens large.

Nos recherches ont ainsi permis d’obtenir les résultats suivants :

  • une base de données des signatures Raman de plusieurs sels en solution permettant leur identification.
  • un étalonnage de la concentration de chaque substance, à partir de leur intensité Raman, après un pré-traitement du signal.
  • divers modèles de prédiction par analyse chimiométrique permettant de repousser les limites de détection et de quantification des produits vers des plus faibles concentrations et d’analyser des solutions mélanges.